10 Mai 2011, cette date qui évoque essentiellement pour beaucoup de mes concitoyens les 30 ans de l’arrivée au pouvoir de François Mitterrand est aussi la date officielle de la commémoration de l’abolition de l’esclavage en France. Je pense que cet événement mérite qu’on s’y arrête un instant d’autant plus que nous sommes à une heure où des propos stigmatisants sur les noirs se propagent et se banalisent. L’affaire Laurent Blanc et la tonalité de certains de ses soutiens l’attestent bien. Nous sommes désormais à une heure où chacun peut stigmatiser « l’africain » ou « le noir » sans rougir. Par exemple, l’entraîneur Christian Gourcuff nous dit en ce 10 Mai «J’ai déjà évoqué les difficultés d’adaptation des joueurs qui viennent d’Afrique aux exigences collectives. (…) Là, on touche à des problèmes d’éducation et de valeurs. Refuser ce constat, c’est aussi empêcher que ces populations évoluent.». Eh oui suite à l’affaire Blanc, il est maintenant admis d’essentialiser les noirs en sous entendant haut et fort qu’ils ont besoin d’évoluer et ont des problèmes de socialisation. Et protester contre de tels propos est maintenant un signe de communautarisme ou de paranoïa raciste.
Aujourd’hui, il est donc important que l’ensemble des citoyens français se réunissent pour commémorer l’abolition de l’esclavage et célébrer les richesses de la diversité culturelle. Je n’ai pas le temps d’aller beaucoup plus loin dans ma reflexion mais j’aimerais partager avec vous le coup de gueule que porte à cette occasion Lucien Pampou, Conseiller municipal UMP à Alfortville :
« (…) La société ordinaire française, au-delà des commémorations, continue de véhiculer des idées racialisantes fondées sur l’anthropologie physique du XIX° siècle qui valorise le Noir en tant qu’acteur social puissant physiquement et donc forcément bestial. Les idées en cours dans le football français reprises par certains intellectuels français qui estiment que l’équipe de France est trop black, black, black et non black, blanc, beur comme en 1998, traduisent l’ancrage des considérations inappropriées en direction des populations noires.
Les commémorations sont une bonne chose pour rappeler à la République son devoir de rassembler les citoyens français quelques soient leurs origines, néanmoins, il revient aux Noirs de France de construire un vaste mouvement durable et quotidien pour montrer à la République leur apport historique au temps de l’esclavage, des guerres de 14/18 et 39/45 et pendant les Trente Glorieuses dans la construction de la France. (…)
En parlant des descendants des esclaves, c’est-à-dire des Antillais ; que sait la population française de l’impact de Joseph de Bologne dit le Chevalier de Saint Georges et du Général Alexandre Dumas qui ont contribué en dépit du racisme du XIX° siècle dont ils ont été victimes, à faire triompher la mémoire de la République en étant des héros noirs ? Que sait la population française des français d’origine sénégalaise du camp de Thiaroye qui ont été exterminé par leurs camarades d’armes français blancs en 45 car ils voulaient simplement réclamer un traitement égalitaire ?
Senghor, Président Africain et chantre de la Négritude, académicien, a été oublié par la République qui ne lui a pas rendu les honneurs à la hauteur de ses missions pour l’incorporation des Noirs dans la France républicaine.
Le chantre de la négritude Aimé Césaire a été reçu au Panthéon en 2011 après des atermoiements de la République. L’homme vertical qui a toujours combattu la colonisation, l’esclavage et qui a toujours reconnu l’Afrique comme matrice originelle de la plupart des Antillais a eu des obsèques républicaines à la mesure de son œuvre, ce dont n’a pas pu profiter Léopold Sédar Senghor.
La commémoration du 10 mai concernant l’abolition de l’esclavage, risque de passer inaperçue en France, notre « beau pays » qui va privilégier plutôt l’anniversaire de l’accès de François Mitterrand aux affaires de la République en tant que président. La commémoration du 10 mai laisse un grand vide dans l’espace public français car les différentes associations ou fédérations de Noirs ne font rien pour occuper l’espace politique ce jour là. (…)
Les futures commémorations du 10 mai à partir de 2012 doivent être le moment clé de l’approfondissement des programmes et des projets politiques pour réfléchir ensemble sur les manières d’exister des populations noires dans la République française. J’espère que ce n’est pas un vœu pieux de ma part. Il faut le faire et montrer à la République que les populations noires sont comme les autres capables de réflexion et d’actions et non pas comme on les présente de façon permanente depuis l’anthropologie physique depuis le XIX° siècle à nos jours à savoir : des Noirs puissants et physiques donc bestiaux pour les hommes et pas simplement dans le football, incapables de réflexion et des femmes noires lascives et sexuellement faciles pour le bon vouloir des hommes. Il revient aux populations noires de démentir ces faits provocants et inutiles que la société française véhicule. »
J’ai fais des coupes dans le texte alors pour voir l’intégralité du post de Lucien Pampou, RDV sur son blog.